La créativité, érigée en compétence clef dans les discours sur l'enseignement, est souvent présentée comme un remède aux défis économiques et sociétaux actuels. Comment les enseignants, confrontés à des injonctions parfois contradictoires entre innovation pédagogique et rigidité des curriculums, comprennent et intègrent-ils la créativité dans leurs pratiques ? La recherche qui fait l'objet de cette communication s’intéresse plus spécifiquement à la définition de la créativité et à sa place perçue dans les pratiques enseignantes en secondaire, dans un système éducatif fragmenté et marqué par des inégalités structurelles. À partir d’entretiens collectifs menés en Belgique francophone dans six établissements secondaires aux filières variées (transition, qualification, pédagogie alternative), elle analyse comment les enseignants d’un côté, et les élèves de l’autre, conçoivent et expérimentent la créativité dans cadre scolaire. Nous y mobilisons les travaux de Boltanski et Thévenot (1991) sur le régime de la justification pour analyser les discours des enseignants, croisant ces données avec leurs logiques d’action et celles de leurs élèves. Les résultats montrent un écart entre les enseignants et les élèves dans leurs conceptions de la créativité, mais également l’existence de logiques d’action dissemblables voire antinomiques, fondées sur des quiproquos et conceptions différenciées des attentes scolaires. Ces représentations et ces écarts s’avèrent corrélés aux filières, à l’ISE, et aux méthodes d’enseignement.